Modification du lieu d'imposition et lutte contre le nomadisme médical

Modification du lieu d'imposition des locations de biens meubles corporels (hors moyens de transport) à un client non assujetti à la tva

A compter du 1er janvier 2024, les prestations de locations de biens meubles corporels (autres que les moyens de transport qui obéissent à des règles particulières) à un client non assujetti sont imposables en France dès lors que le bien loué est utilisé ou exploité en France (CGI, art. 259 C, 3° nouveau).

Remarque : Sont par exemple visées les locations de matériel sportif ou de matériel utilisé lors de loisirs.Jusqu'à présent, lorsque le client était établi en dehors de l'Union européenne, les règles de territorialité de la TVA entraînaient une exonération de TVA en France et à l'étranger. La loi de finances pour 2024 modifie cette règle afin de remédier à cette inégalité fiscale entre les particuliers.

Source : L. n° 2023-1322, 29 déc. 2023, art. 112, I, B : JO 30 déc. 2023

 

Fraude : l’employé utilisant les données de son employeur pour émettre de fausses factures est redevable de la tva

La Cour de justice de l'Union européenne vient de rendre un arrêt en matière de fraude à la TVA. La question qui lui était posée était la suivante : un employé qui utilise les données de la société qui l'emploie pour émettre de fausses factures est-il le redevable de la TVA ou bien est-ce la société ?

Les faits

Entre 2010 et 2014, l'employée d'une société polonaise exploitant une station de service a émis 1 679 factures ne reflétant pas des ventes réelles de biens, pour une valeur d'environ 320 000 €. À cette fin, elle a utilisé les données de son employeur, assujetti à la TVA, à son insu et sans son consentement. Les factures frauduleuses n'ont pas été comptabilisées dans des déclarations fiscales de la société et les clients de la station service ont obtenu le remboursement indu de la TVA payée, sans que la taxe correspondante n'ait été versée au Trésor polonais.

À la suite d'un contrôle fiscal, la TVA facturée frauduleusement a été mise à la charge de la société car, selon l'administration fiscale polonaise, les agissements frauduleux ont été rendus possibles du fait de l'absence de supervision et d'organisation adéquate au sein de la société qui embauchait l'employée.

La société a contesté cette décision devant le juge national qui, à son tour, a saisi la Cour de justice. En principe, le redevable de la TVA au sens de la Directive TVA est la personne qui la mentionne sur les factures de vente. Dans cette affaire, s'agissait-il de la société ou de l'employée ?

Réponse de la Cour

La CJUE juge que la TVA ne peut pas être due par l'émetteur apparent d'une fausse facture (la société) lorsqu'il est de bonne foi et que l'administration fiscale connaît l'identité de la personne ayant réellement émis cette facture. Dans une telle situation, c'est cette personne qui est redevable de la TVA.

Pour être considéré comme de bonne foi, l'employeur est tenu de prouver la diligence raisonnablement requise pour contrôler les agissements de ses employés et, ce faisant, pour éviter que ses données ne soient utilisées pour mettre de fausses factures. A défaut d'une telle preuve, c'est l'employeur qui doit être considéré comme étant la personne obligée de payer la TVA indiquée sur les factures frauduleuses.

Remarque : Dans un tel cas de figure, l'entreprise doit démontrer qu'il existe un système de contrôle des employés. Il peut s'agir :
d'un contrôle interne : une seule personne est habilitée à facturer et encaisser les clients, un suivi des stocks est effectué, la caisse est vérifiée…
ou d'un contrôle externe : on fait appel à des auditeurs (commissaires aux comptes ou auditeurs contractuels) pour détecter les anomalies éventuelles.

Dans le cas des TPE/PME où le nombre d'employés est limité, le risque de fraude est élevé mais plus facilement détectable.

Source : CJUE, Aff. C-442/22 | Dyrektor Izby Administracji Skarbowej w Lublinie

 

Lutte contre le “nomadisme médical”

La loi du 27 décembre 2023 visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels impose désormais un délai minimal aux professionnels de santé avant qu'ils ne puissent à nouveau bénéficier de certaines aides à l'installation ou exonérations fiscales dans certaines zones du territoire.

Cette mesure a été prise pour lutter contre ce que l'on a pu appeler le “nomadisme médical”, des professionnels de santé qui déplacent géographiquement leur cabinet pour bénéficier d'avantages fiscaux et financiers. Désormais, ceux ayant bénéficié d'exonérations lors de leur installation ne pourront plus être éligibles aux mêmes aides et exonérations qu'à l'expiration d'un délai de 10 ans (un décret à venir définira les modalités d'application de cette mesure).

Les exonérations fiscales visées visées sont celles applicables dans les zones suivantes :
- zones d'aide à finalité régionale (ZAFR) et zones d'aide à l'investissement des PME (ZAIPME) (CGI, art. 44 sexies),
- zones franches urbaines - territoires entrepreneurs (ZFU-TE) (CGI, 44 octies A),
- bassins d'emploi à redynamiser (BER) (CGI, art. 44 duodecies),
- zones de restructuration de la défense (ZRD) (CGI, art. 44 terdecies)
- et zones de revitalisation rurale (ZRR) (CGI, art. 44 quindecies).

Les aides à l'installation sont celles versées par les collectivités territoriales (C. gén. coll. territ., art. L. 1511-8) et celles prévues par la convention visée à l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale.

Source : L. n° 2023-1268, 27 déc. 2023, art. 2 : JO 28 déc. 2023

 

L’imposition des associés de sociétés d’exercice libéral fait débat…

Les rémunérations techniques servies aux associés de sociétés d'exercice libéral à compter du 1er janvier 2024 seront imposables à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (CGI, art. 92). Jusque-là, elles étaient imposées dans la catégorie des traitements et salaires (CGI, art. 62).

Ce changement de régime d'imposition a fait l'objet de commentaires de la part de l'Administration, en raison des nombreuses conséquences qu'il implique au plan fiscal (impôt sur le revenu, TVA, cotisation foncière des entreprises, épargne salariale…) (V. BOI-RES-BNC-000136, 27 déc. 2023).

Le Conseil national des Barreaux conteste l'application du régime BNC aux rémunérations techniques des associés de SEL et donne mandat au bureau d'introduire toute demande d'abrogation ou tout recours utile relatifs aux commentaires administratifs et dispositions du BOFiP. Il souhaite également relancer les discussions avec l'administration fiscale afin de trouver une solution adaptée aux spécificités de la profession d'avocat.

Le CNB indique par ailleurs que la modification de l'article 62 CGI, qui consacrerait les spécificités de l'associé professionnel exerçant, serait la solution la plus efficace pour la question du régime fiscal des rémunérations techniques des associés de SEL.

Source : CNB, Actualité 23 janv. 2024

Crédit photo : Infogéa

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